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LE MONDE PLANETE

Maltraitance animale : les députés veulent une vidéosurveillance obligatoire dans les abattoirs

« Insuffisance des contrôles »

« Lever l’omerta » sur les abattoirs, ces lieux, source d’inquiétudes et de fantasmes, où l’on cache la mort des animaux. Tel est l’objectif du rapport de la commission d’enquête parlementaire sur les conditions d’abattage des animaux de boucherie, rendu public mardi 20 septembre et que Le Monde a pu consulter. Ce texte de 255 pages, riche et précis, avance 65 propositions pour améliorer le bien-être des bêtes mais aussi celui des salariés. Avec une mesure phare : rendre obligatoire le contrôle vidéo dans les abattoirs, en installant des caméras partout où des animaux vivants sont conduits ou tués. La commission, la première sur cette question en France, a été créée le 22 mars par l’Assemblée nationale, à la suite des nombreux scandales de maltraitance animale dans des abattoirs révélés par l’association L214. Des vidéos, tournées en caméra cachée dans des établissements d’Alès et du Vigan (Gard), de Mauléon-Licharre (Pyrénées-Atlantiques), de Pézenas (Hérault) et du Mercantour (Alpes­-Maritimes), montraient des bovins, des agneaux ou des chevaux reprendre conscience lors de la saignée, frappés par des ouvriers, jetés contre des enclos ou poussés à coups d’aiguillons électriques sur la tête. Autant d’infractions aux législations en vigueur, en particulier au règlement européen de 2009 sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort, entré en application en 2013 en France. Ces sévices heurtent aussi une opinion publique de plus en plus sensible aux questions de bien-être des bêtes.

« Ouverture aux associations »

L’ensemble de ces inspections a révélé de « nombreux dysfonctionnements souvent mineurs, parfois majeurs, auxquels il est indispensable de remédier », note le rapport. Des manquements qui concernent tous types d’établissements, depuis les petits abattoirs locaux, souvent publics ou coopératifs, aux grands abattoirs industriels, qui tuent plusieurs millions d’animaux par an. « Aucun lien ne peut être établi entre le statut (public ou privé) et la taille des abattoirs et leur respect de la réglementation relative à la protection animale », assure le rapporteur Jean-Yves Caullet. Le rapport avance différentes pistes pour pallier « l’insuffisance des contrôles des abattoirs et de transparence ». Il s’agit d’augmenter les effectifs des services vétérinaires et de mieux les former à la protection animale. Si 1 300 agents de la direction générale de l’alimentation sont constamment présents dans les 941 établissements afin de les contrôler, leurs effectifs sont en baisse (−19 % en dix ans, malgré la création de nouveaux postes depuis 2015) et leur rôle est tourné en priorité vers l’inspection sanitaire, « au détriment » du bien-être des bêtes. Ces agents devraient disposer d’un nouvel outil : la vidéosurveillance, qui serait généralisée dans l’ensemble des endroits « critiques » des abattoirs, à savoir les quais de déchargement, la zone de stabulation (où les animaux sont maintenus avant d’être tués) et les postes d’abattage. Cette mesure, demandée de longue date par les associations et redoutée par une partie des professionnels, « doit être encadrée par la loi afin d’en délimiter les finalités », à savoir le bien-être animal et éventuellement la formation des ouvriers.

« Il faut éviter qu’elle ne devienne un outil de surveillance des salariés », préviennent les députés, qui ont auditionné la Commission nationale de l’informatique et des libertés sur la question. Les images seraient visibles par les services vétérinaires, les directions d’abattoirs, voire les syndicats, mais pas par les associations. « Nous enjoignons l’Etat à aider financièrement les petits abattoirs pour l’installation des caméras », précise M. Falorni.